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Monographie d’Erlon 1914-1920Histoire locale / Articles

Thème : GuerresCatégorie : Monographies, Première guerre mondiale 1914-1918Commune(s) : ERLONAuteur : Chauderlier institutrice


Commune d’Erlon

A.- Territoire occupé par les armées allemandes

I.- Généralités

a).- A quelle date les Allemands ont-ils pris possession de votre village ?

1er Septembre 1914.

b).- La prise de possession s’est-elle effectuée à la suite d’escarmouches, à la suite de combats sanglants, ou sans coup férir ?

Sans coup férir.

c).- Quelle a été l’attitude de l’autorité militaire à l’égard de la population pendant les premiers jours ? Dans la suite de l’occupation ?

Les officiers rassuraient la population : « Civils bons pour soldats, disaient-ils, soldats bons pour civils ! ». Dans la suite vexations, violences ; perquisitions de la cave au grenier non seulement le jour ; de temps à autre la nuit par crainte d’espionnage.

d).- Pouvez-vous rapporter quelques propos authentiques tenus par des officiers ou des soldats, et qui soient caractéristiques de leur état d’esprit ou de l’opinion publique en Allemagne à cette époque ?

« C’est Poincaré qui a voulu la guerre… Français ! Malheur !!!. Nous, à Paris, la guerre bientôt finie. »

e).- Pouvez-vous citer quelques ordres ou prescriptions émanant de l’autorité ennemie où se manifestait plus spécialement son système de « guerre aux civils » ?

Hommes, femmes, enfants étaient forcés de travailler sous la surveillance de soldats allemands. Ils devaient répondre à l’appel deux fois par jour, même s’il était impossible de travailler. Les malades devaient aller régulièrement à la visite médicale qui a eu lieu très souvent dans ma classe. Chaque commune était obligée d’acheter un certain nombre de journaux : « Gazette des Ardennes ». Les victoires remportées en Russie ou en Autriche étaient annoncées aux habitants puis affichées ainsi que le nom des soldats français ou anglais fusillés avec leurs bienfaiteurs.

II.- Des rapports de l’Autorité ennemie avec la population scolaire

a).- Les établissements d’instruction (écoles, etc.) ont-ils été ouverts pendant toute la durée de l’occupation ? Ou momentanément fermés, ou ont-ils été fermés pendant toute la guerre?

L’école des filles a fonctionné régulièrement d’octobre 1914 jusqu’en mai 1917. A cette époque elle a été fermée une quinzaine de jours, occupée par la troupe, puis réouverte pour quelques semaines, de nouveau fermée et ainsi de suite jusque fin octobre 1917 où elle fut convertie en hôpital militaire. Le 20 Juin 1918 elle nous était de nouveau rendue jusqu’au 25 Juillet. Le 26 Juillet un tribunal militaire s’y installait, enfin la troupe. Il a été impossible de trouver un local pour continuer la classe.

b).- Quelles ont été les prescriptions particulières édictées par les Allemands à l’égard des établissements d’instruction ?

Ordre du 23 février 1915. Toutes les écoles qui sont encore doivent être réouvertes de suite. 15 juin 1915. Faire savoir si l’on fait régulièrement l’école et comment se fait la surveillance.

c).- Le commandant de place s’est-il immiscé dans les services d’enseignement ?

Juin 1915. La Commandanture d’Autremencourt a désigné Monseigneur Lesur, maire de Mortiers, Inspecteur des Ecoles. Il est chargé de surveiller et d’inspecter les écoles ; de faire un rapport sur la bonne tenue des classes et sur l’instruction des enfants.

d).- Des officiers délégués ou inspecteurs allemands ont-ils émis la prétention de contrôler

l’enseignement? Ont-ils pénétré dans l’école ? Ont-ils interrogé les élèves ?

Pas un officier ni inspecteur allemand n’a pénétré dans l’école, ni contrôlé l’enseignement. Monseigneur Lesur a visité une seule fois la classe, fin Juillet 1915. Il a interrogé les élèves en calcul ; questions très simples. Fait écrire quelques phrases courtes sur l’ardoise. Avant de sortir il a donné quelques bons conseils aux enfants.

e).- Les élèves des établissements (écoles, etc.) ont-ils été contraints à quelques travaux manuels ?

Quelle a été l’attitude des élèves dans ces circonstances ? Particularité, réponses, réflexions dignes de remarque.

Les enfants à partir de 12 ans, quelquefois 10 ans, devaient suivre les ouvriers des champs et comme eux répondre à l’appel deux fois par jour. Les plus jeunes devaient recueillir des fleurs et des feuilles, suivant la saison, sous la surveillance de l’institutrice ; au moment de la moisson, ramasser les épis qui avaient échappé à la main des moissonneurs, après la récolte en levée. Il fallait obéir sous peine d’amende ou de prison pour les parents.

f).- Quelle a été, en général, l’attitude des soldats à l’égard des enfants ? L’attitude des enfants à l’égard des troupes ?

En général, les soldats étaient corrects à l’égard des enfants, j’en ai vu qui partageaient avec eux les gâteaux qu’ils recevaient de leurs familles.

Les enfants saluaient les officiers, l’ordre ayant été donné par la Commandanture. Ici, un jeune homme de 18 ans a fait 3 jours de prison pour n’avoir pas ôté sa coiffure au passage d’un officier, en auto.

g).- Le séjour des troupes allemandes a-t-il influé en quelque mesure sur le parler local ? Quelques mots allemands, plus ou moins déformés, y ont-ils pénétré, et paraissent-ils devoir persister ?

Pendant l’occupation, les habitants avaient appris quelques mots allemands pour se faire comprendre des soldats. Du jour de la Libération, ces mots sont tombés et il n’en reste aucune trace sur le parler local.

Libérés par l’armée française le 6 Novembre 1918, nous sommes restés avec les soldats français jusque fin janvier 1919.

Aucune troupe alliée n’a occupé la commune d’Erlon.

Ci-joint un devoir d’élève : « Souvenirs de l’invasion »

De Renée Basquin.

Erlon le 29 mai 1920.

L’institutrice,

C. Chauderlie ?

Source : BDIC La Guerre dans le ressort de l’Académie de Lille. 1914-1920