Thème : Contes, légendes et chansonsAuteur : Jean Richepin
« Tant l’on crie Noël qu’il vient. »
François VILLON.
C’est vrai qu’il vient et qu’on le crie !
Mais non sur un air d’oliphant,
Quand on a la gorge meurtrie
par l’hiver à l’ongle griffant.
Las ! avec un râle étouffant
Il est salué chaque année
Chez ceux qu’il glace en arrivant,
Ceux qui n’ont pas de cheminée.
Il paraît la mine fleurie,
Plus joyeux qu’un soleil levant,
Apportant fête et gâterie,
Bonbons, joujoux, cadeaux, devant
Le bébé riche et triomphant.
Mais quelle âpre et triste journée
Pour les pauvres repus de vent,
Ceux qui n’ont pas de cheminée !
Heureux le cher enfant qui prie
Pour son soulier au noeud bouffant,
Afin que Jésus lui sourie !
Aux gueux, le sort le leur défend !
Leur Soulier dur, crevé souvent,
Dans quelle cendre satinée
Se mettrait-ils, en y rêvant,
Ceux qui n’ont pas de cheminée ?
ENVOI
Prince, ayez pitié de l’enfant
Dont la face est parcheminée,
Faites Noël en réchauffant
Ceux qui n’ont pas de cheminée.
Jean RICHEPIN, La chanson des gueux, Fasquelle, 1876.
Ce poème est publié dans le Grand Echo de l’Aisne le 25.12.1920, un noël où l’ont parle plutôt des sinistrés et des dommages de guerres…
En son temps, Jean Richepin a fait de la prison pour son recueil de poème.
Dessin :Toulouse-Lautrec, Henri de, 1864-1901